xavier.bazin@sante-corps-esprit.fr
Et si c’était ça, la clé du bonheur ?
C’est une leçon de
vie qui restera toujours gravé dans ma mémoire.
C’était en
Tanzanie. Je revenais des gorges d’Olduvai, considérées comme le berceau de
l’humanité… car c’est là où tout a commencé pour nous, hominidés !
Encore émerveillé
par cette symbolique, je me dirigeai vers mon deuxième objectif de la journée :
la rencontre avec les Masaïs.
Les Masaïs sont un
des tout derniers peuples au monde à vivre selon les coutumes et traditions de
leurs ancêtres – et cela, depuis des milliers d’années !
Semi-nomades, ils
migrent chaque année au Kenya lorsque la saison sèche frappe la Tanzanie. Ils
emmènent alors leurs troupeaux de vaches, chèvres et moutons… et, arrivés à
destination, ils reconstruisent entièrement leur village.
Ce jour-là, j’ai
eu la chance d’être accueilli par le fils du chef du village. Il me conduisit
dans sa « maison », une sorte d’igloo fait de boue, de bouse de vache et de
branchages.
Et c’est dans cet
espace minuscule, au confort plus que rudimentaire, qu’il me fit cette
confidence qui me laissa sans voix. Lui, le guerrier masaï qui me faisait face,
était diplômé de l’Université de Dar es Salam, la capitale économique de
Tanzanie !
•Mais, mais… lui-dis-je, n’avez-vous pas eu la tentation
de rester en ville ?
•Jamais de la vie, me sourit-il avec un enthousiasme et
une sincérité désarmante. Je suis beaucoup plus heureux ici !
Cet homme avait goûté pendant plusieurs années au confort
de la vie moderne… et pourtant, pour rien au monde il n’aurait renoncé à la vie
masaï, rythmée par la tradition, les lois de la nature et la cadence des
saisons.
Comment est-ce
possible ? Qu’avait-il compris du bonheur qui m’échappait totalement ?
La réponse, je
crois, est que notre vie moderne n’a pas que des bons côtés : elle comporte
aussi des pièges cruels et difficiles à déjouer… sauf si l’on nous en donne les
clés !
Premier piège : l’abondance
Le confort est un bienfait incontestable… mais il ne fait
jamais le bonheur.
Des psychologues
l’ont montré de façon frappante en étudiant des gagnants du loto : ces «
heureux élus » vivent quelques mois d’euphorie… mais au bout d’un an environ,
ils reviennent presque toujours à leur niveau de bonheur d’avant.
Ils ont beau avoir
une grande maison, une voiture de luxe et un confort matériel incomparable avec
leur vie d’avant, ils ne sont pas plus heureux. Pour une raison simple : ils
s’y sont habitués.
Car il nous est
très difficile de nous réjouir d’une source de bonheur si elle est là tous les
jours. On finit par trouver cela normal et on n’y pense plus.
On oublie qu’avoir
deux jambes pour marcher est une chance énorme… jusqu’au jour où l’on se
fracture la cheville.
Les psychologues
appellent cela « l’habituation hédonique » : c’est notre tendance à tenir pour
« acquis » tout ce que nous avons.
Et sur ce point,
les sociétés traditionnelles ont un avantage.
Là-bas, manger à
sa faim, boire à sa soif, survivre aux caprices de la nature n’est jamais
totalement garanti. Ils en retirent donc un bonheur quotidien plus profond et
durable.
Voici comment
l’agriculteur et écrivain Pierre Rabhi parle de la petite communauté algérienne
de son enfance :
« Ici, l’existence s’éprouve d’une manière tangible. La
moindre gorgée d’eau, la moindre bouchée de nourriture donne à la vie sur fond
de patience toujours renouvelée, une réelle saveur. On est prompt à la
satisfaction et à la gratitude dès lors que l’essentiel est assuré, comme si un
jour vécu était déjà un privilège, un sursis ». [1]
Avec l’abondance, au contraire, on risque toujours de
ressembler à ces enfants gâtés… qui ne réalisent pas la chance qu’ils ont… et
qui n’arrêtent pas d’en réclamer davantage
Plutôt que de
penser à ceux qui n’ont pas leur chance, ils trépignent de ne pas posséder ce
que leurs camarades viennent d’avoir.
Voilà pourquoi la
course à l’accumulation des richesses ne conduit jamais au bonheur ! C’est le
destin du hamster condamné à tourner en rond dans sa cage, sans jamais arriver
nulle part.
Car il y aura
toujours autour de nous quelqu’un de mieux loti, que l’on pourrait jalouser.
Et c’est une pente
d’autant plus dramatique qu’il n’y a rien de plus précieux dans la vie d’un
être humain que d’entretenir des relations saines et profondes avec ses
semblables.
Deuxième piège : la solitude
Tout le monde le sait, intuitivement : le plus grand
trésor qu’il nous est donné d’avoir sur cette terre, c’est l’amour et
l’affection qui nous lie aux autres.
Cela a même été
prouvé scientifiquement, grâce à l’incroyable « étude de Harvard », commencée
en 1938 et encore poursuivie aujourd’hui.
Depuis 80 ans, des
chercheurs examinent minutieusement le parcours de vie de plus de 700
Américains. Chaque année, ils réalisent avec eux des interviews approfondies et
examinent leurs bilans de santé.
Ils cherchaient à
savoir ce qui, dans leur parcours et leurs habitudes de vie, contribuait le
plus au bonheur et à la longévité.
Leur conclusion
est sans appel : ce qui rend heureux et en bonne santé, ce n’est ni l’argent,
ni le succès… mais le fait de nouer des relations étroites, amicales ou
amoureuses ! [2]
Selon le Dr
Waldinger, qui a dirigé les recherches :
« La conclusion la plus nette que nous pouvons tirer de
cette étude de 75 ans est celle-ci : de bonnes relations nous maintiennent
heureux et en bonne santé. C’est tout. »
Le problème, malheureusement, c’est que la modernité ne
nous y aide pas vraiment !
Les Masaïs, eux,
n’ont aucun effort à faire : de leur naissance à leur mort, ils ne sont jamais
seuls. Ils jouissent d’interactions permanentes avec les membres de leur
village, qui n’est autre qu’une grande famille de 150 personnes environ.
Dans nos sociétés
modernes, au contraire, on peut choisir de passer toute la journée derrière un
écran de télévision et d’ordinateur, sans jamais sortir de chez soi…
Or la solitude n’est pas seulement liée au malheur : elle
est aussi la cause directe d’un état de santé dégradé : mort prématurée [3],
déclin cognitif [4], crise cardiaque. [5]
Et
malheureusement, les « amis virtuels » que nous offre la technologie (Facebook…)
ne sont pas d’un grand secours. Rien ne remplace le contact face à face, yeux
dans les yeux. [6]
Les nouvelles
technologies sont décidément à double tranchant. Si vous n’y prenez pas garde,
elles peuvent même vous entraîner dans le dernier grand piège de notre temps :
Troisième piège : la vitesse
Il suffit de passer quelques minutes au cœur d’une grande
ville pour en faire l’expérience : bruits, feux rouges, voitures, passants,
panneaux publicitaires, vitrines : notre état de conscience est interrompu sans
arrêt par un flux ininterrompu de stimulations.
Et avec les
nouvelles technologies, c’est encore pire : sonneries, SMS, emails, tweets…
notre esprit est sollicité et interrompu en permanence.
Le problème est
que notre cerveau n’est pas fait pour cela. C’est au contraire le meilleur
moyen de le faire dépérir !
Car notre
bien-être dépend en grande partie de notre capacité à être attentif : c’est
lorsque nous sommes réellement présents à ce que nous faisons que nous sommes
le plus heureux.
Or la
sur-stimulation de notre temps détraque notre attention et entraîne notre
cerveau dans un tourbillon incessant. Il est incapable de fixer son attention…
et en ressort lessivé !
Cultivez la simplicité avec ce mantra secret
Voilà, il me semble, 3 grands pièges de notre modernité.
Mais la bonne
nouvelle, c’est que chacun de ces poisons possède son antidote ! Ces pièges
peuvent être déjoués par des solutions simples et faciles à suivre !
Et cela commence
par un maître mot, la simplicité.
Cultiver la
simplicité, ou la sobriété, c’est aller à l’essentiel. Comme dans une vieille
maison, il est important de faire le tri… et se débarrasser du superflu et des
distractions.
C’est renoncer à
l’accumulation de biens matériels dont nous n’avons pas besoin. C’est jouir des
plaisirs simples de la vie en y étant pleinement présent.
Être « simple
d’esprit », ce n’est pas être stupide, bien au contraire.
C’est fuir les
complications et les distorsions de la vie moderne pour mieux embrasser une vie
sobre, profonde et authentique.
Ce n’est pas
évident, bien sûr. Comme le rappelle le Pr Kabat Zinn :
« Il est tellement facile de regarder sans voir, d’écouter
sans entendre, de manger sans rien goûter, de ne pas sentir le parfum de la
terre humide après une averse, et même de toucher les autres sans être
conscient des émotions que l’on échange » [7]
Heureusement, il existe des exercices pratiques qui nous aident
à revenir à l’essentiel.
L’un d’entre eux
est le « mantra secret », révélé par le philosophe Matthieu Ricard :
« Voici le mantra qu’un maître tibétain a recommandé.
C’est le mantra le plus secret qu’on puisse imaginer, je me demande même si j’ai
la permission de le partager avec vous.Le voici : « je n’ai besoin de rien ».
Répétez-le dix fois de suite. Vous verrez, on se sent si bien ! »
Voilà le premier pas vers le bonheur : réaliser qu’on n’a
pas besoin d’avoir « toujours plus » pour être heureux.
Musclez votre esprit, entraînez le à la sérénité
Mais cela ne suffit pas, évidemment.
Si on le laisse à
lui-même, notre cerveau se compare, jalouse, rumine… et ce ne sont pas les
sur-stimulations permanentes du monde moderne qui l’aident à se calmer !
Voilà pourquoi il
est crucial de muscler notre cerveau dans la durée pour l’habituer au calme et
à la satisfaction du moment présent.
Et pour y réussir,
je ne connais pas meilleure pratique que la méditation en pleine conscience.
Ne soyez surtout
pas intimidé par ce terme de « méditation ». C’est beaucoup plus simple et «
terre à terre » qu’on ne le croit : il s’agit uniquement de s’arrêter quelques
secondes ou quelques minutes dans sa journée, et de se concentrer sur l’instant
présent.
On peut écouter
son cœur battre, sentir sa respiration, faire un « scan corporel » en essayant
de ressentir chacun de nos membres (jusqu’à nos doigts de pieds), écouter les
sons autour de soi.
Cela peut être
éprouvant, au départ. Car lorsque l’on plonge dans les méandres de notre
esprit, on y trouve parfois une forme de chaos.
Et on se rend
compte à quel point il peut être difficile d’empêcher notre esprit de «
vagabonder » ! On est en permanence obligé de se rappeler à l’ordre (avec
bienveillance) et d’en revenir à la concentration sur le moment présent.
Mais quelle
récompense, lorsque vous faites l’effort !
Pas seulement pour
ces moments de grâce où vous goûtez soudainement à une autre expérience du
monde et de vous-même…
…mais surtout pour
les effets de long terme de cette pratique pour retrouver la sérénité au
quotidien.
Réduction du
stress, de l’anxiété, des problèmes cardiaques, des douleurs chroniques, des
troubles du sommeil… on ne compte plus les bienfaits de la méditation, prouvés
scientifiquement. [8]
Mantra secret,
méditation… ajoutez à cela quelques exercices de gratitude et vous serez comblé
:
Soyez reconnaissant de ce que vous avez
J’ai consacré une lettre complète aux vertus
thérapeutiques du sentiment de gratitude, et aux études scientifiques récentes
qui en montrent les éclatants bienfaits pour notre santé.
Mais la gratitude
est beaucoup plus qu’un médicament : c’est l’antidote le plus puissant de la
modernité… parce qu’elle nous pousse à nous comparer à ceux qui ont moins,
plutôt qu’à ceux qui ont plus.
Et c’est si simple
! Voici comment faire, si vous voulez profiter de ses bienfaits :
Dès le matin, au
réveil, prenez quelques secondes pour réaliser la chance que vous avez.
Vous auriez pu
vous réveiller aveugle, sourd ou paralysé… mais non, votre cœur bat
tranquillement, vous respirez sans difficulté, vous avez bien vos deux jambes,
vos deux bras et une tête bien faite.
Vous avez la
chance d’avoir un toit au-dessus de votre tête. Vous avez l’eau courante,
l’électricité à toute heure de la journée, un ordinateur qui vous permet de
vous connecter à des informations passionnantes.
Vous vivez dans un
pays libre. Vous avez des yeux pour admirer la beauté de ce qui nous entoure.
Maintenant, allez
un cran plus loin : soyez reconnaissant de tout ceci. Dites merci. Exprimez
votre gratitude.
Si vous être
croyant, c’est facile : il vous suffit de remercier le Créateur. Si vous ne
l’êtes pas, vous pouvez vous contenter de remercier « la vie » pour tous ses
bienfaits.
Essayez de
réaliser que ce qu’il y a de positif dans votre vie, vous le devez au moins en
partie à quelqu’un d’autre : à vos parents qui vous ont donné la vie, et à tous
ceux qui l’ont influencé, etc. Remerciez-les en pensée.
Vous pouvez aussi
remercier les ouvriers qui ont construit votre chambre, les artisans qui ont
fabriqué votre matelas, les paysans qui ont fait pousser le café que vous vous
apprêtez à déguster. Et ainsi de suite.
Vous êtes malade,
vous souffrez, vous traversez des épreuves ? Faites tout de même l’effort de
remercier la vie pour ce qu’elle vous apporte de positif. Des chercheurs ont
montré que la gratitude est efficace y compris chez des victimes d’une maladie
dégénérescente et incurable. [9]
Voilà, après ces
quelques secondes de gratitude, vous pouvez à présent vous lever et bien
commencer la journée.
Et le soir venu,
juste avant de dormir, prenez à nouveau une à deux minutes.
Cette fois, pensez
(ou, mieux encore, notez dans un carnet !) à tout ce qui vous est arrivé de
positif dans la journée, et exprimez votre reconnaissance à ceux qui l’ont facilité.
« Soyons reconnaissants aux personnes qui nous donnent du
bonheur ; elles sont les charmants jardiniers par qui nos âmes sont fleuries »,
disait joliment Marcel Proust.
Et bien sûr, tout au long de la journée, pensez bien à
remercier chaleureusement tous ceux qui vous rendent service. Ne considérez
jamais rien comme « donné » – par exemple, n’hésitez pas à remercier votre
conjoint d’avoir cuisiné… même s’il le fait depuis 30 ans !!
La magie de la
gratitude est de nous lier plus étroitement aux autres. Elle nous pousse à la
bienveillance envers celui qui nous a rendu service… qui se sentira d’autant
plus proche de vous qu’il recevra un « merci » !
Cultivez la simplicité, la sérénité et la gratitude… et
vous verrez que l’amour sera décuplé dans votre cœur et celui de votre
entourage.
Et c’est bien
cela, le plus important dans la vie.
Bonne santé… et
joyeux Noël !
Xavier Bazin
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